L’IA chez Nomadia, c’est quoi ?
L’intelligence artificielle s’invite dans toutes les activités humaines. Qu’en est-il chez Nomadia ? Franck Laugier, Data Scientist responsable du développement de l’IA chez Nomadia, nous explique comment le groupe intègre les avancées de l’IA pour les mettre au service de l’efficacité des équipes et de la performance de ses clients.
Franck LAUGIER, Data Scientist responsable du développement de l’IA chez Nomadia
- Quel est aujourd’hui le positionnement de l’IA dans l’organisation du groupe Nomadia ?
- Quels sont les défis inhérents au déploiement de l’IA dans les entreprises ?
- Comment peut-on s’assurer qu’un projet d’intégration d’IA réussisse ?
- Est-ce que les logiciels Nomadia intégrant de l’IA impliquent l’acquisition de nouvelles compétences pour les utilisateurs ?
- L’intelligence artificielle fascine, mais suscite aussi des inquiétudes et des craintes. Dans quelle mesure ces craintes sont-elles justifiées ?
- Quelles précautions prend Nomadia pour garder la pleine maîtrise de ses outils d’IA?
Quel est aujourd’hui le positionnement de l’IA dans l’organisation du groupe Nomadia ?
Nomadia a très logiquement positionné l’intelligence artificielle dans la direction « Core » de la R&D qui a pour caractéristique d’être au service des 6 autres directions de la R&D. Contrairement à ces dernières, la direction dont l’IA fait partie ne travaille pas sur un produit spécifique, mais sur des modules ayant vocation à être intégrés dans les différents produits et services de Nomadia.
Ce positionnement transversal permet de bien comprendre que l’IA n’est pas un produit – et encore moins un produit autonome — mais un ensemble de techniques et d’outils que nous employons tant pour optimiser nos processus internes que pour enrichir les fonctionnalités des logiciels Nomadia et l’expérience utilisateur. Cet enrichissement se fait sous la forme de briques d’IA venant s’intégrer dans les produits existants avec deux grandes finalités : d’une part, minimiser les activités à faible valeur ajoutée et, d’autre part, aider les utilisateurs à prendre de meilleures décisions au quotidien, qu’il s’agisse de décisions tactiques, stratégiques ou purement opérationnelles.
Quels sont les défis inhérents au déploiement de l’IA dans les entreprises et plus spécifiquement dans un groupe comme Nomadia ?
D’un point de vue général, les entreprises sont toutes dans l’obligation de s’interroger sur le rôle et la place de l’IA dans leurs activités et leur organisation. Le premier défi n’est pas dans la mise en œuvre, mais d’abord dans la compréhension de ce qu’est l’intelligence artificielle aujourd’hui. Cette compréhension me paraît essentielle pour faire reculer le mythe de l’IA « magique » ou de l’IA « à tout faire » et se concentrer sur les cas d’usage les plus pertinents pour chaque entreprise. Nomadia n’a pas procédé autrement : nous avons identifié plus de 50 cas d’usage qui ont permis de construire une feuille de route tenant compte de nos priorités business et des attentes de nos clients.
Passer de l’intention à la mise en œuvre et aux déploiements effectifs de produits IA est un deuxième défi pour toutes les entreprises. Depuis que les algorithmes de machine learning sont devenus largement accessibles, de nombreuses études montrent que 50 % des projets IA/data réalisés en interne ne dépassent pas le stade du prototype, soit par manque de moyens et de compétences, soit faute de résultats convaincants. On n’en est plus tout à fait là, principalement parce que l’IA entre de plus en plus dans les entreprises par le biais de logiciels comme les nôtres. En tant qu’éditeur de logiciels, nous intégrons dans nos produits des briques d’IA qui permettent à nos clients de travailler plus vite et mieux sans posséder de compétences spécifiques en IA.
Toute la difficulté pour nous, éditeur de logiciels métiers, est que nous ne partons pas d’une page blanche. Nous ne faisons pas de l’IA « hors sol ». Nous introduisons des briques d’IA dans des produits et des écosystèmes existants, ce qui nécessite de croiser les compétences de tous les corps de métiers techniques de Nomadia – développeurs, hosting, équipes data, etc. — pour parvenir à une solution intégrée, à la fois stable et simple pour les clients.
Comment peut-on s’assurer qu’un projet d’intégration d’IA réussisse ?
Pour Nomadia comme pour n’importe quelle entreprise, on n’est jamais totalement sûr qu’un projet IA conduise aux résultats escomptés initialement. En découle l’importance de réaliser pour chaque projet, pour chaque problématique, une étude de faisabilité qui, en plus de valider la faisabilité technique, doit répondre à deux questions essentielles pour justifier l’investissement : combien cela va coûter versus ce que cela va faire gagner ? Et dans quel délai ?
Une fois cette preuve de concept réalisée et validée, plusieurs itérations sur l’affinage des modèles seront généralement nécessaires.
J’insiste beaucoup sur le fait qu’il n’y a rien de magique dans l’IA. Ce n’est que de la statistique et des mathématiques. Aussi impressionnante soit-elle, une IA générative comme ChatGPT est de la statistique. Mais une des forces de l’intelligence artificielle actuelle, grâce aux réseaux de neurones et aux algorithmes d’apprentissage, est la capacité d’ingérer des milliards et des milliards de données pour produire cette statistique plus vite que ne le feraient des millions d’ordinateurs et des milliards de cerveaux humains. C’est ainsi qu’on arrive à obtenir quasi instantanément des prévisions que tous les statisticiens du monde n’arriveraient pas à calculer en 100 ans !
Cela signifie aussi que pour qu’un projet d’IA réussisse il faut réunir certaines compétences que toutes les entreprises ne peuvent pas s’offrir, mais qui deviennent indispensables chez un éditeur de logiciels. Je pense aux data scientists, dont la compétence clé est de savoir quel algorithme peut répondre à telle ou telle problématique. Je pense également aux data engineers. Ces derniers ont également un rôle prépondérant car ce sont eux qui intégreront concrètement la data science dans des écosystèmes existants pour livrer des solutions efficaces et sans couture.
Est-ce que les logiciels Nomadia intégrant de l’IA impliquent l’acquisition de nouvelles compétences pour les utilisateurs ?
Le fait d’intégrer de l’IA étend les possibilités de nos logiciels, mais ne demande aucune compétence particulière de la part de l’utilisateur final. La correction automatique des comptes-rendus d’intervention grâce à l’IA générative, les prévisions de temps d’intervention ou encore les recommandations d’actions pertinentes à faire dans un contexte métier donné sont là pour aider les utilisateurs et leur faire gagner du temps.
C’est la même chose en interne, par exemple avec l’outil de recherche à base d’IA que nous avons créé pour nos équipes de support. Là où il fallait plusieurs minutes pour trouver la bonne information, ce système explore en quelques fractions de seconde toutes les connaissances engrangées par le support depuis des décennies, remonte les tickets similaires et hiérarchise les solutions qui y ont été apportées. C’est un gain de temps qui se chiffre en heures pour les équipes, mais aussi un gain de pertinence dans les réponses. L’IA est là pour apporter de la facilité, de la rapidité, de l’efficacité, pas pour rendre les choses plus compliquées ! C’est en tout cas dans cet esprit que nous travaillons.
L’intelligence artificielle fascine, mais suscite aussi des inquiétudes et des craintes. Dans quelle mesure ces craintes sont-elles justifiées ?
De par sa capacité à traiter avec efficacité des milliard d’informations, les craintes peuvent être justifiées. On pourra citer comme exemple la surveillance de nos espaces publiques par la vidéo. De cette vidéosurveillance algorithmique pour « la bonne cause » à un contrôle social généralisé qui attente aux libertés individuelles, il n’y a malheureusement qu’un pas.
Un autre risque majeur concerne la véracité de l’information. Les réseaux sociaux regorgent déjà d’images et de vidéos créées par des IA génératives. Que l’on parle de textes ou d’images, comment fera-t-on demain pour discerner une véritable information d’une information fabriquée par l’IA à des fins manipulatoires ou criminelles ? C’est une question qui n’a pas de réponse pour l’instant.
Il faut donc être extrêmement vigilent et adopter des comportements qui minimisent les risques. Par exemple, éviter d’inclure des données personnelles dans vos discussions avec des modèles d’IA générative et si vous utilisez ce type d’outils grand public en entreprise, veiller à ne pas divulguer d’informations stratégiques et de données soumises au RGPD.
Quelles précautions prend Nomadia pour garder la pleine maîtrise de ses outils d’intelligence artificielle ?
C’est un point extrêmement important. Pour des raisons de confidentialité et d’indépendance, notre première règle est de faire tout ce que nous pouvons avec de l’open source et en interne.
Ensuite, pour entraîner nos modèles d’IA, nous travaillons avec des jeux de données anonymisées, ce qui évite les problèmes de non-conformité avec le RGPD et répond aux préoccupations de nos clients les plus soucieux de la sécurité et de la confidentialité de leurs données.
Enfin, nous n’hébergeons rien de ce qui est destiné au marché européen en dehors de l’Union européenne. C’est en nous tenant à ces règles que nous pouvons apporter des garanties à nos clients et continuer à leur proposer des solutions qui tirent partie de l’IA partout où elle peut simplifier, accélérer, optimiser ce que font leurs collaborateurs.